Différences entre les versions de « Lucien Jaume:Le libéralisme français après la Révolution, comparé au libéralisme anglais »

 
Ligne 13 : Ligne 13 :


== Introduction ==
== Introduction ==
Les rapports du [[:wl:libéralisme|libéralisme]] avec les phénomène [[:wl:révolution|révolutionnaires]] sont complexes, ce qui contribue aux difficultés pour caractériser le libéralisme comme un ensemble doté d’unité. D’un côté, le libéralisme peut être conservateur, notamment en s’opposant à divers moments aux poussées populaires d’esprit démocratique et radical, comme on le voit en France sous la monarchie de Juillet, ou, à la même période, en Angleterre vis-à-vis du chartisme. Mais en même temps le libéralisme est porteur de la modernité, il est issu d’aspirations révolutionnaires, il vient stabiliser certaines phases révolutionnaires, avec la volonté d’en garder les acquis : le libéralisme anglais, sous la forme du [[:wl:Whiggs|whiggisme]], est une consolidation progressive, réformiste, de la « [[:wl:Glorieuse Révolution d'Angleterre|Glorious Revolution]] » de 1688 ; le libéralisme français est profondément marqué par 10 ans de Révolution, mais aussi par la phase autoritaire de Napoléon dont il voudrait assouplir les institutions. Le combat sur deux fronts à la fois (celui des révolutionnaires, celui des contre-révolutionnaires) le mobilise tout au long du XIXe siècle.  
Les rapports du [[:wl:libéralisme|libéralisme]] avec les phénomènes [[:wl:révolution|révolutionnaires]] sont complexes, ce qui contribue aux difficultés pour caractériser le libéralisme comme un ensemble doté d’unité. D’un côté, le libéralisme peut être conservateur, notamment en s’opposant à divers moments aux poussées populaires d’esprit démocratique et radical, comme on le voit en France sous la monarchie de Juillet, ou, à la même période, en Angleterre vis-à-vis du chartisme. Mais en même temps le libéralisme est porteur de la modernité, il est issu d’aspirations révolutionnaires, il vient stabiliser certaines phases révolutionnaires, avec la volonté d’en garder les acquis : le libéralisme anglais, sous la forme du [[:wl:Whiggs|whiggisme]], est une consolidation progressive, réformiste, de la « [[:wl:Glorieuse Révolution d'Angleterre|Glorious Revolution]] » de 1688 ; le libéralisme français est profondément marqué par 10 ans de Révolution, mais aussi par la phase autoritaire de Napoléon dont il voudrait assouplir les institutions. Le combat sur deux fronts à la fois (celui des révolutionnaires, celui des contre-révolutionnaires) le mobilise tout au long du XIXe siècle.  


Sur un plan intellectuel, le lien essentiel que le libéralisme possède avec l’idée de liberté le met en phase avec certains aspects de l’esprit révolutionnaire : chez [[:wl:John Locke|Locke]], dans le ''Second traité du gouvernement'', la révolution est l’horizon permanent, le débouché toujours possible par rapport à la normalité politique. Locke est sans doute la pensée libérale qui unit jusqu’à un point inégalé l’esprit de conservation et l’esprit de révolution. Cependant, en France, l'orléanisme, quoique issu d’une révolution (celle de 1830), veut aussitôt freiner ce que Guizot et Rémusat appellent « l’esprit révolutionnaire », et en Angleterre, [[:wl:Edmund Burke|Burke]] (qui est un whig et non pas un tory) s’insurge contre la pratique de la « table rase » dans la Révolution française. On peut donc se demander en quoi [[:wl:Benjamin Constant|Benjamin Constant]] et [[:wl:François Guizot|Guizot]], par exemple, ou Locke et Burke, en Angleterre, participent  d’un même univers qualifié de « libéral ». Je vais d’abord essayer de montrer ce qui justifie une telle appellation commune ; ultérieurement j’approfondirai le cadre historique propre à chacun des deux libéralismes. Enfin, dans une dernière étape, je montrerai les conséquences sur trois domaines essentiels.
Sur un plan intellectuel, le lien essentiel que le libéralisme possède avec l’idée de liberté le met en phase avec certains aspects de l’esprit révolutionnaire : chez [[:wl:John Locke|Locke]], dans le ''Second traité du gouvernement'', la révolution est l’horizon permanent, le débouché toujours possible par rapport à la normalité politique. Locke est sans doute la pensée libérale qui unit jusqu’à un point inégalé l’esprit de conservation et l’esprit de révolution. Cependant, en France, l'orléanisme, quoique issu d’une révolution (celle de 1830), veut aussitôt freiner ce que Guizot et Rémusat appellent « l’esprit révolutionnaire », et en Angleterre, [[:wl:Edmund Burke|Burke]] (qui est un whig et non pas un tory) s’insurge contre la pratique de la « table rase » dans la Révolution française. On peut donc se demander en quoi [[:wl:Benjamin Constant|Benjamin Constant]] et [[:wl:François Guizot|Guizot]], par exemple, ou Locke et Burke, en Angleterre, participent  d’un même univers qualifié de « libéral ». Je vais d’abord essayer de montrer ce qui justifie une telle appellation commune ; ultérieurement j’approfondirai le cadre historique propre à chacun des deux libéralismes. Enfin, dans une dernière étape, je montrerai les conséquences sur trois domaines essentiels.
3 471

modifications