Différences entre les versions de « John Rawls:Libéraux et communautariens nord-américains et rôle de l'Etat »

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Mais, « le héros libéral, qui est son propre auteur et celui de ses rôles sociaux n'est qu'un mythe… », car, « les projets des hommes et des femmes libres sont hérités au moins autant  qu'ils sont inventé… même les plus libres des hommes et des femmes expérimentent et innovent toujours sous un certain nombre de contraintes morales … ». À ce mythe du héros libéral répond une description fictive de la vie des institutions. En effet, « en aucun cas  [elles] n'apparaissent entièrement façonnées par la volonté et l'accord individuels, car ces accords n'existent qu'en fonction d'ensembles déterminés de règles, coutumes et formes de coopération qui les contraignent ». Dans ces conditions, que reste t-il du grand principe de séparation? De fait, « ce ne sont pas les individus qu'on sépare, mais les institutions, les pratiques et les relations de toutes sortes ». Quand un libéral se fonde sur l'individu, il part toujours du fondement ultime. Mais ce socle appartient toujours à l'univers social : c'est toujours un individu-en-société et jamais un individu-en-soi. Le libéralisme exprime les réalités profondes de la société nord-américaine : « une société dont les individus sont relativement dissociés et séparés les uns des autres- ou plus exactement s'éloignent continuellement les uns des autres ».
Mais, « le héros libéral, qui est son propre auteur et celui de ses rôles sociaux n'est qu'un mythe… », car, « les projets des hommes et des femmes libres sont hérités au moins autant  qu'ils sont inventé… même les plus libres des hommes et des femmes expérimentent et innovent toujours sous un certain nombre de contraintes morales … ». À ce mythe du héros libéral répond une description fictive de la vie des institutions. En effet, « en aucun cas  [elles] n'apparaissent entièrement façonnées par la volonté et l'accord individuels, car ces accords n'existent qu'en fonction d'ensembles déterminés de règles, coutumes et formes de coopération qui les contraignent ». Dans ces conditions, que reste t-il du grand principe de séparation? De fait, « ce ne sont pas les individus qu'on sépare, mais les institutions, les pratiques et les relations de toutes sortes ». Quand un libéral se fonde sur l'individu, il part toujours du fondement ultime. Mais ce socle appartient toujours à l'univers social : c'est toujours un individu-en-société et jamais un individu-en-soi. Le libéralisme exprime les réalités profondes de la société nord-américaine : « une société dont les individus sont relativement dissociés et séparés les uns des autres- ou plus exactement s'éloignent continuellement les uns des autres ».


Pour réaliser une « égale liberté », les libéraux politiques préconisent et pratiquent l'art de la séparation : chaque bien social (éducation, santé, pouvoir, religion, argent…) doit être séparé des autres et constituer autant de domaine fonctionnant selon des principes spécifiques. Ce qui suppose une séparation interdisant une ingérence des autres sphères. Ainsi la séparation de l'Église et de l'État a permis la liberté religieuse en même temps que la laïcité. C'est la même idée qui préside à la séparation de l'État et du marché. La société civile est constituée par la sphère de la concurrence économique, de la libre entreprise ainsi que des marchés des biens, du travail et du capital: elle doit être séparée de la sphère politique et réciproquement. Il n'est pas difficile de montrer que dans la réalité, cette séparation est très partielle et que des liens se tissent entre les différentes sphères au bénéfice exclusif d'intérêts sociaux issus du pouvoir de la richesse. Car l'argent est le « passager clandestin » par excellence : il a une tendance incoercible à envahir les autres sphères, rendant les inégalités cumulatives. Face à cette constatation, deux positions sont possibles : celle de la gauche révolutionnaire traditionnelle (et plus particulièrement de Marx) critiquant l'art de la séparation parce qu'illusoire en régime capitaliste ou celle réformiste qui consiste à lutter pour une véritable séparation, à recruter cet outil libéral au service du socialisme.
Pour réaliser une « égale liberté », les libéraux politiques préconisent et pratiquent l'art de la séparation : chaque bien social (éducation, santé, pouvoir, religion, argent…) doit être séparé des autres et constituer autant de domaine fonctionnant selon des principes spécifiques. Ce qui suppose une séparation interdisant une ingérence des autres sphères. Ainsi la séparation de l'Église et de l'État a permis la liberté religieuse en même temps que la laïcité. C'est la même idée qui préside à la séparation de l'État et du marché. La société civile est constituée par la sphère de la concurrence économique, de la libre entreprise ainsi que des marchés des biens, du travail et du capital: elle doit être séparée de la sphère politique et réciproquement. Il n'est pas difficile de montrer que dans la réalité, cette séparation est très partielle et que des liens se tissent entre les différentes sphères au bénéfice exclusif d'intérêts sociaux issus du pouvoir de la richesse. Car l'argent est le « [https://www.wikiberal.org/wiki/Passager_clandestin passager clandestin] » par excellence : il a une tendance incoercible à envahir les autres sphères, rendant les inégalités cumulatives. Face à cette constatation, deux positions sont possibles : celle de la gauche révolutionnaire traditionnelle (et plus particulièrement de Marx) critiquant l'art de la séparation parce qu'illusoire en régime capitaliste ou celle réformiste qui consiste à lutter pour une véritable séparation, à recruter cet outil libéral au service du socialisme.


«Un marché libre (relativement) protégé des trois formes de coercitions [inégalités de richesses, structure de commandement dans les grandes entreprises, et utilisation de la force de coercition de l'État par le capital] nécessite une structure positive. Le libre échange ne se maintiendra pas de lui-même : il a besoin d'être soutenu par des institutions, des règles des mœurs et des coutumes… Dans la sphère économique l'art de la séparation devrait fonctionner tant contre le capitalisme d'État que contre l'État capitaliste, mais il ne sera pas efficace s'il n'est pas accompagné par des dépossessions et des déconcentrations, et si aucune habitude culturelle appropriée n'est adoptée dans le cadre de la sphère économique… Sans dépossession et sans propriété coopérative, le marché aura tendance à prendre un tour déviant l'art de la séparation : de nouvelles connexions entre les domaines séparés se rétablissent alors rapidement… ».
«Un marché libre (relativement) protégé des trois formes de coercitions [inégalités de richesses, structure de commandement dans les grandes entreprises, et utilisation de la force de coercition de l'État par le capital] nécessite une structure positive. Le libre échange ne se maintiendra pas de lui-même : il a besoin d'être soutenu par des institutions, des règles des mœurs et des coutumes… Dans la sphère économique l'art de la séparation devrait fonctionner tant contre le capitalisme d'État que contre l'État capitaliste, mais il ne sera pas efficace s'il n'est pas accompagné par des dépossessions et des déconcentrations, et si aucune habitude culturelle appropriée n'est adoptée dans le cadre de la sphère économique… Sans dépossession et sans propriété coopérative, le marché aura tendance à prendre un tour déviant l'art de la séparation : de nouvelles connexions entre les domaines séparés se rétablissent alors rapidement… ».
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